E comme Esprit de l'Amour

 

GRACQ : « Le rêve est d’ailleurs »

Après le cérémonial d’accueil je tends à Julien Gracq la feuille imprimée où j’ai recopié parmi ses citations autour du rêve celles que je préfère et un dialogue s’engage.
Le rêve est d’ailleurs et s’évapore au premier rayon du soleil.
Les grands rêves, tels que celui dont l'éventement est encore sur moi comme un passage d'aile, apportent tout un allègement mystérieux. Ils sont écrits souverainement dans une seule clé.

Puis j’explique mon hésitation entre deux titres : L’encyclopédie des rêves et Le palais des songes.
« Dans un premier jet, l’ouvrage a été rédigé de manière assez scientifique, assez rigide. Dans cette ligne, le titre d’Encyclopédie allait de soi mais plus le travail avance, plus je m’oriente vers une substance plus littéraire au point de la moduler en conte. Le Palais des songes ne serait-il pas plus approprié ? Il tranche :
L'Encyclopédie des rêves, ça fait plus important ; Le Palais des songes, c’est plus littéraire.
– Que préférez-vous ?
– J’aime le titre d’Encyclopédie pour son sérieux mais c’est à vous de voir.
À un moment clé de l’entretien, je lui demande :
– Que pourriez-vous me dire sur le devenir de l’homme, ici ou ailleurs, dans ce monde, qu’advient-il ?
Il répond sur le monde général de l’homme en voie de disparition :
Avec un sourire ambigu, il glisse qu’il n’est pas mécontent de partir prochainement pour ne pas voir la dégénérescence se poursuivre. Il dit parler en tant que géographe, contraint d’observer les mutations.
En même temps, il élude habilement la partie de l’ailleurs et ne pouvant revenir à ce sujet, je songe à lui soumettre une citation de Lettrines 2. Les papiers sont éparpillés autour de moi et de l’un des deux sacs je sors l’ouvrage, l’ouvre à la page 70, entreprenant la lecture de son propre texte :
La promesse d’immortalité faite à l’homme, dans la très faible mesure où il m’est possible d’y ajouter foi, tient moins, en ce qui me concerne, à la croyance qu’il ne retournera pas tout entier à la terre qu’à la persuasion instinctive où je suis qu’il n’en est jamais tout à fait sorti.
[…]
– Votre distinction entre les catégories de rêves, me paraît parfaitement justifiée.  Le rêve centon serait l’émanation de la carcasse de l’homme et le reflet de son bien ou mal manger, de ses souhaits, de ses soucis du quotidien, de ses besoins vitaux à l’image de l’animal, de la plante et par contraste, le grand rêve émanerait d’un ailleurs que je pense être notre besace, notre partie spirituelle. 
Il m’interrompt alors :
– Notre double, comme les Égyptiens.
[…] »

L’oracle sur le rêve

Déclame l’oracle de sagesse à ton amie qui ne l’a jamais entendu. 
Saïka s’incline devant la reine, fait un clin d’œil à Roxane et se lance :
L’homme aime se vouer à mes délices et se délecte de ses fantasmagories. Sous mon égide, il s’invente un monde où il décline d’infinies virtualités. Je suis, j’ai été un moyen de guérir ou d’influencer. Qui ne partait avec les auspices ou contre eux ? On observait le vol d’un oiseau, le vol d’un aigle… Ah, il n’a pas franchi le templum, pas de combat… Oh, j’ai fait un songe ! Ah, quel beau cicérone et quelle jolie chanson ! Je vous entraîne, je vous enlève, je vous soûle de mon songe… le sommeil ou la mort ? Être ou ne pas être ? Vivre ou mourir, tel est le dilemme d’Hamlet en proie à la désillusion, ballotté sur une mer de larmes, assailli par les vagues de détresse de l’amour méprisé, des assauts dont hérite la  chair, des rebuffades des puissants et des outrages de l’oppression. Mourir, dormir, pas plus. Après tout, Hypnos est frère jumeau de Thanatos.
To die, to sleep – To sleep perchance to dream : ay, there’s the rub, For in that sleep of death what dreams may come When we have shuffled off this mortal coil, Must give us pause.

Mourir… dormir, dormir ! Peut-être rêver ! Oui là est l’embarras. Car quels rêves peut-il nous venir dans ce sommeil de la mort, quand nous sommes débarrassés de l’étreinte de cette vie ?
[…]

A comme Amour

L'étoile a perlé rose et le fil parlé d'or
au firmament azur, dépouillés de nos leurres,
ceints dans nos oripeaux, la jeunesse dans sa fleur
flots de chair affolée, cette genèse adore.
Et j'ai bu à la source, assoiffée de grande ourse
de sagesse professée, dans la fleur d'allégresse.
Bercée par vos caresses, grisée par la noblesse
d'une étreinte des âmes, fraîche comme eau de source.

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